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DUERP et sécurité au travail : l’obligation ESG dès le 1er salarié

28 septembre 2025 par
DUERP et sécurité au travail : l’obligation ESG dès le 1er salarié
Olivier DUPRE

Nous entendons de plus en plus parler d’ESG et de Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE), y compris pour les petites structures. Un aspect fondamental de cet engagement social concerne la sécurité au travail. En France, dès l’embauche de notre premier salarié, nous avons l’obligation de rédiger un DUERP – le Document Unique d’Évaluation des Risques Professionnels. Voyons concrètement de quoi il s’agit, à quoi il sert et comment le mettre en place, et comment cet outil s’intègre dans la démarche ESG/RSE de nos PME.

Qu’est-ce que le DUERP ?


Le Document Unique d’Évaluation des Risques Professionnels (DUERP) est un registre qui consigne l’évaluation de tous les risques présents dans l’entreprise et les mesures de prévention envisagées. Autrement dit, il regroupe l’ensemble des résultats de l’évaluation des risques auxquels sont exposés nos salariés, afin de formaliser pour chaque risque identifié des actions de prévention concrètes et ciblées. Ce document n’est pas une formalité administrative de plus : il constitue le socle d’une politique de prévention efficace et s’inscrit dans une dynamique d’amélioration continue des conditions de travail.

Obligation légale dès le 1ersalarié : L’élaboration du DUERP est imposée par le Code du travail (article R.4121-1). Toute entreprise, dès l’embauche du premier salarié, doit établir et tenir à jour un DUERP. Cela signifie que même si nous n’avons qu’un seul salarié (qu’il soit en CDI, CDD, alternant ou même stagiaire), nous sommes tenus de rédiger ce document. Cette obligation, en vigueur depuis 2001, vise à garantir que dès la première embauche, l’employeur évalue les risques pour la santé et la sécurité et planifie des mesures de prévention appropriées. Il s’agit d’une déclinaison concrète de notre obligation générale, en tant qu’employeur, d’assurer la sécurité et de protéger la santé de nos collaborateurs.


À quoi sert le DUERP ?


Le DUERP est un outil central de notre démarche de prévention des risques professionnels. Ses utilités principales sont les suivantes :

  • Prévenir les risques et protéger la santé des salariés : Le principal objectif du DUERP est d’identifier, analyser et prévenir les risques auxquels sont exposés nos salariés dans le cadre de leur travail. En listant tous les dangers (machines, produits, situations de travail, etc.) et en évaluant les risques associés, nous pouvons mieux anticiper les accidents du travail et les maladies professionnelles. C’est un levier concret pour éviter les incidents et améliorer la sécurité au quotidien.

  • Piloter la sécurité au travail au quotidien : Le DUERP constitue un véritable outil de pilotage de notre politique Santé-Sécurité. En analysant les risques, l’employeur formalise la mise en place d’un plan de prévention adapté et assure ainsi un environnement de travail plus sûr (par exemple, remplacer ce qui est dangereux, adapter les méthodes de travail, former les salariés, fournir les protections nécessaires…). Le document unique nous permet de suivre l’avancement des actions et d’ajuster nos mesures en fonction de l’évolution de l’entreprise ou des retours du terrain. Il centralise toutes les données de risques, ce qui facilite le suivi et la coordination des actions de sécurité.

  • Base du plan d’action de prévention : Le DUERP est la base du plan d’action en matière de santé au travail. Une fois les risques évalués, il s’agit de définir des mesures de prévention et un plan d’actions pour réduire ces risques. Pour les entreprises de 50 salariés et plus, la loi demande d’élaborer un programme annuel de prévention des risques et d’amélioration des conditions de travail à partir du DUERP. Mais même dans une petite entreprise, il est recommandé d’inscrire dans le DUERP la liste des actions de prévention que nous envisageons. En pratique, notre DUERP débouche directement sur un plan d’actions : par exemple, si un risque de chute est identifié dans l’atelier, nous prévoyons dans le DUERP l’installation d’un garde-corps ou une formation à la sécurité pour y remédier.

  • Traçabilité et suivi dans le temps : Le DUERP assure la traçabilité des risques et des actions de prévention engagées. En effet, l’ensemble des résultats de l’évaluation et des mesures prises sont consignés par écrit pour des raisons de preuve et de suivi. Ainsi, le document unique garde la mémoire de l’exposition de nos travailleurs aux différents risques, ce qui peut s’avérer précieux avec le recul des années (certains problèmes de santé liés au travail n’apparaissent que longtemps après). C’est pourquoi la réglementation récente renforce cette traçabilité : depuis la loi du 2 août 2021, chaque version du DUERP doit être conservée pendant 40 ans et archivée, afin de garder l’historique des évaluations et actions de prévention. Cette conservation sur le long terme permettra, le cas échéant, de prouver notre vigilance en cas de contrôle ou de litige ultérieur relatif à une maladie professionnelle.

En résumé, le DUERP est à la fois un inventaire des risques, un plan d’actions de prévention et un dossier de suivi. C’est l’outil indispensable de la prévention dans l’entreprise, dès le premier salarié.

Les grandes étapes pour mettre en place le DUERP


Rédiger un DUERP peut sembler technique, mais il s’agit surtout de suivre une démarche logique et participative. Voici les grandes étapes que nous suivons pour élaborer et faire vivre ce document :

Identifier les dangers présents

Nous commençons par recenser tous les dangers potentiels dans l’entreprise. Un danger est une source possible de dommage ou d’effet néfaste (une machine, un produit chimique, une situation de travail stressante, un bruit important, etc.). Il faut être exhaustif : observer chaque poste de travail, chaque tâche, consulter les salariés sur ce qu’ils perçoivent comme dangereux. Par exemple, des escaliers ou une installation électrique défectueuse constituent des dangers susceptibles de causer un dommage.

Proposer des mesures et élaborer un plan d’action

Pour chaque risque identifié et évalué, nous définissons des actions de prévention appropriées. Il s’agit de réfléchir aux moyens de supprimer le danger ou, si ce n’est pas possible, de réduire le risque au maximum. On applique les principes généraux de prévention (éviter le risque, combattre à la source, remplacer ce qui est dangereux par moins dangereux, protéger collectivement avant individuellement, etc.). Concrètement, le plan d’action peut inclure par exemple : des aménagements techniques (installer un garde-fou, une ventilation, améliorer l’ergonomie d’un poste), l’achat d’équipements de protection (casques, gants, protections auditives…), la mise à jour des procédures de travail, des formations ou sensibilisations du personnel, etc. Toutes ces mesures décidées sont consignées dans le DUERP, avec éventuellement un calendrier de mise en œuvre. Pour les plus grandes entreprises, cela prend la forme d’un programme annuel de prévention formalisé, mais pour une petite structure il est tout à fait possible d’intégrer directement la liste d’actions dans le DUERP lui-même. L’important est que notre DUERP débouche sur des actions concrètes pour améliorer la sécurité.

Évaluer les risques pour chaque danger

Une fois les dangers identifiés, nous analysons les risques associés, c’est-à-dire la combinaison entre la probabilité qu’un incident survienne et la gravité potentielle de ses conséquences. En d’autres termes, on s’intéresse à l’exposition des salariés à chaque danger : fréquence d’exposition, nombre de personnes concernées, gravité possible de l’accident ou de la maladie, etc. Dans notre exemple, le danger « escalier » présente le risque de chute dans cet escalier, et le danger « électricité » présente le risque d’électrocution en changeant une ampoule. Nous classons ou hiérarchisons les risques identifiés selon leur niveau (mineur, significatif, critique…) pour faire ressortir les priorités d’action. Cette évaluation structurée nous permet de prendre du recul sur nos activités quotidiennes et de repérer où se situent les urgences en matière de prévention.

Mettre en œuvre, suivre et mettre à jour le DUERP régulièrement

Un DUERP n’est pas figé une fois pour toutes : c’est un document vivant qui doit évoluer avec l’entreprise. Après avoir mis en œuvre les mesures prévues, nous devons suivre leur efficacité (par exemple suivre les indicateurs d’accidents ou presque-accidents, les retours des salariés, etc.) et ajuster si besoin. Surtout, il est obligatoire de mettre à jour le DUERP de façon périodique. La loi prévoit une mise à jour au moins annuelle dans la plupart des cas. Dans les très petites entreprises, une révision formelle chaque année n’est pas forcément imposée tant qu’il n’y a pas de changement, mais en pratique il est fortement recommandé de réévaluer les risques au moins une fois par an pour vérifier que rien n’a évolué. Par ailleurs, toute modification importante doit entraîner une actualisation du DUERP sans attendre : après un accident du travail, lors de l’introduction d’un nouvel équipement ou d’un nouveau procédé, d’un changement dans l’organisation (déménagement, nouvelle ligne de production, arrivée d’un nouveau personnel, etc.), ou encore si une information nouvelle sur un risque apparaît (par exemple un fabricant qui signale un danger sur un produit). Chaque mise à jour doit être datée et conservée. Cela garantit que notre prévention reste cohérente et adaptée dans le temps, et permet de tracer l’historique de l’amélioration des conditions de travail.


En suivant ces étapes – identification des dangers, évaluation des risques, plan d’action, suivi et mises à jour – nous construisons un DUERP solide et opérationnel. Il est important d’associer les salariés à la démarche (par le biais, lorsque c’est possible, du CSE – Comité Social et Économique – ou simplement via des discussions sur le terrain), ainsi que le médecin du travail ou le service de prévention externe. Le DUERP doit être accessible aux employés et à jour en cas de contrôle de l’Inspection du travail. C’est un processus continu : l’évaluation des risques fait partie intégrante de la vie de l’entreprise.


DUERP et engagement ESG/RSE dans les PME


Au-delà de la stricte obligation légale, la mise en place du DUERP s’inscrit pleinement dans notre démarche ESG/RSE en tant qu’employeur. En effet, le volet Social des critères ESG englobe notamment la santé, la sécurité et le bien-être au travail. Dès le premier salarié, assurer la sécurité de nos collaborateurs est un engagement social fort et une responsabilité essentielle de l’employeur. Rédiger et actualiser le DUERP, c’est prouver concrètement que nous prenons à cœur la prévention des risques et la santé de nos employés – ce qui est un pilier de la RSE dans nos PME.

On peut dire que le DUERP et la RSE se complètent : le DUERP vise spécifiquement à identifier et prévenir les risques professionnels, tandis que la Responsabilité Sociétale de l’Entreprise adopte une vision plus large du bien-être des employés et des impacts sociaux de l’entreprise. En pratique, un DUERP solide fournit une méthode structurée pour évaluer les risques humains et de sécurité, ce qui s’aligne parfaitement avec les objectifs globaux de la RSE sur le plan social. Un document unique bien conçu et transparent est d’ailleurs le signe d’un engagement éthique de notre part et d’une gouvernance responsable, des aspects fondamentaux d’une bonne démarche RSE. En intégrant la santé-sécurité au travail dans notre stratégie, nous favorisons un dialogue social de qualité et une amélioration des conditions de travail, ce qui rejoint la recherche de qualité de vie au travail (QVT) et de performance durable.

En clair, élaborer le DUERP ne revient pas seulement à se conformer à la loi : c’est aussi faire de la prévention des risques un atout pour l’entreprise et ses parties prenantes. Un environnement de travail plus sûr et plus sain contribue au bien-être et à la motivation de nos salariés, renforçant leur engagement. Cela améliore aussi notre image en tant qu’employeur responsable, ce qui est apprécié de plus en plus par les clients, partenaires ou investisseurs sensibles aux critères ESG. Le DUERP devient ainsi un levier de progression pour l’entreprise : un outil efficace au service du dialogue social, de l’organisation du travail et de la performance globale. En tant que dirigeants de PME, nous avons tout intérêt à transformer cette obligation en opportunité d’amélioration continue.


Conclusion


Pour résumer, le DUERP est obligatoire dès le premier salarié et constitue à la fois un outil de conformité réglementaire et un pilier de la prévention des risques en entreprise. En identifiant les dangers, en évaluant les risques, puis en mettant en œuvre un plan d’action et en mettant à jour régulièrement ce document, nous protégeons nos collaborateurs et améliorons nos pratiques de sécurité au travail. Cette démarche s’inscrit pleinement dans l’engagement ESG/RSE de l’entreprise, témoignant de notre responsabilité sociale envers nos employés. Accessible et concret, le DUERP nous aide à piloter la sécurité de manière structurée, à tracer nos progrès en santé au travail, et à ancrer la prévention dans la culture de notre organisation. En somme, dès que nous disons « Bienvenue à bord » à notre premier salarié, nous endossons aussi le rôle de garant de sa sécurité : le DUERP est l’outil incontournable pour assumer pleinement cette responsabilité.

Sources : Le Document Unique d’Évaluation des Risques Professionnels est défini par le Code du travail (art. R4121-1) et détaillé sur le site officiel Service-Public. Des ressources comme les pages de l’INRS et des services de santé au travail rappellent son importance en tant qu’outil de pilotage de la prévention. La loi du 2 août 2021 « Santé au travail » a renforcé son rôle (archivage 40 ans, plan d’action, etc.). Enfin, de nombreux experts soulignent l’articulation entre DUERP et RSE, le document unique étant un moyen concret de promouvoir la santé au travail dans la stratégie ESG de l’entreprise.